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ROCK'N GAUME

L'ACTU ROCK EN PROVINCE DE LUXEMBOURG

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INTERVIEWS

13/09/13

BRNS

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BRNS, POUR « BRAINS ». 130 CONCERTS DEPUIS LA CRÉATION DU GROUPE, IL Y A DEUX ANS. ET PAS DES MOINDRES : ANCIENNE BELGIQUE, PUKKELPOP, DOUR, ROCK EN SEINE, FRANCOS, VIEILLES CHARRUES, PALEO… LA TÊTE BIEN SUR LES ÉPAULES, LES 4 GAILLARDS ÉTAIENT DE PASSAGE AU WARD'IN ROCK 2013 : L'OCCASION DE REVENIR SUR LA TRAJECTOIRE D'UN NOUVEL OVNI POP ROCK BELGE.

Vos impressions sur ce concert ?

Antoine : C'était la première fois qu'on venait ici, c'était chouette, une bonne ambiance, les gens étaient réceptifs. C'est cool, parce que quand on joue dans des festivals avec des grandes têtes d'affiche pour un plus grand public, on ne sait jamais trop comment ça va se passer, on est toujours un peu les outsiders un peu bizarroïdes. Mais c'est super cool de voir que les gens restent et sont « dedans », qu'il y en a qui chantent les chansons, même quand il n'y a pas grand monde. On se dit à ce moment-là qu'on a réussi, en tournant, à ce que les gens reviennent nous voir. Dans notre cas, c'est vraiment ce bouche-à-oreille qui nous a amené là.

Justement, comment s'est monté le projet ?

A : On vient tous de projets différents. Tim et moi nous sommes mis à deux pour composer quelque chose qui nous correspondait : sans trop se poser de question, on a fondé un projet pop, un peu plus ambitieux que ce qu'on avait fait avant. Diego nous a vite rejoints avec sa guitare, et César est venu par après.

Tim : Le laps de temps dans lequel on a composé les premiers titres a été relativement court, on avait fait à deux quelques grosses bases, et puis on a enregistré le disque avec Diego, en deux temps. En six mois on avait composé les prémices de « Wounded », qu'on a sorti il y a un an et demi. Et de fil en aiguille, on a balancé des titres sur le net et on a eu pleins de dates de concert, sans qu'on ne comprenne vraiment pourquoi !

C'est donc votre premier projet ensemble ?

A : En soi, non, on a eu d'autres groupes, notamment un groupe de pop. Moi j'avais joué avec Diego dans un groupe de funk rock, et César est un ancien des Tellers qu'on est allé récupérer en fin de projet. On avait donc tous eu quelques expériences de groupes mais c'était le premier projet qu'on montait de A à Z. On n'espérait pas le moindre concert, on pensait que ça allait être le flop absolu comme tous nos autres projets… Mais quand ça a un peu marché, on ne s'est pas emballés, on s'est dit : « c'est bien, mais il faut rester calme ».

Que s'est-il passé depuis le Verdur' Rock, comment en êtes-vous arrivés à vous produire aux Ardentes, à Dour ou encore au Rock En Seine ?

T : On ne s'attendait pas à ce que ça aille à cette vitesse-là. On faisait ça dans notre coin, avec une manière assez indépendante de gérer le groupe. Il y a eu beaucoup de bouche-à-oreille, le net a assez aidé évidemment, on a été relayés par des blogs, on a été chroniqués par pas mal de médias. En même temps, on a eu une évolution assez naturelle et à échelle humaine : on a fait petit à petit toutes les étapes. Aujourd'hui, on est toujours en train de construire le groupe avec « Wounded », qu'on a sorti finalement il y a assez longtemps.

A : On a fait attention à ne pas brûler les étapes, à ne pas faire les cons. Ne pas s'emballer en se disant « Voilà, il y a un peu de succès et on va pouvoir tourner comme des dingues et faire le buzz ». C'est un peu à double tranchant. On s'est dit qu'on allait sortir un peu de notre cave et on construire les bases solides d'un projet à long terme plutôt que de s'emballer.

Parlez-nous de votre relation avec Limite Records. Le label déclare s'être monté pour faire découvrir de petits groupes locaux, notamment BRNS. Le groupe aurait-il pu exister sans ce label ?

A : Oui, ça aurait pu marcher sans, en fait. Nous avons des amis, Xavier et Dave, programmateurs à l'Atelier 210. J'ai fait mon stage là-bas à l'époque de mes études. L'un d'eux a entendu le titre qu'on avait juste sorti sur le net et un mois après, nous étions programmés à l'Atelier 210. En fait c'est un fan de vinyles, qui a voulu faire sortir notre disque. On a partagé les coûts de production et lui a créé un petit label pour l'occasion, pour marquer le coup.

T : Il avait ce projet depuis longtemps, et je pense qu'il a profité d'un coup de cœur pour nous pour lancer là dedans.

A : Oui, c'est ça ! Et nous on voulait aussi sortir le disque en vinyle, donc ça tombait très bien. C'était vraiment chouette de le faire avec lui, parce c'est un passionné ! On a fait toutes les étapes de la production avec lui et un autre gars, c'était assez marrant. Par contre, ce n'était pas vraiment décisif, c'était plutôt pout avoir quelque chose à vendre aux concerts parce qu'on n'avait rien, pas de disque, juste trois titres sur le net qui nous permettaient de tourner. Ça restait maigre pour les gens qui venaient sans savoir à quoi s'attendre, c'était un peu bizarre.

Vous êtes donc le premier groupe à avoir été signé sur Limite Record ?

T : Exactement.

A : Le seul et unique, en fait, parce que ça représente quand même un budget.

Quel est votre regard sur l'industrie du disque ? Avec l'avancée d'internet, pensez-vous qu'il y ait encore un intérêt à signer dans une maison de disque ?

A : C'est une très vaste question. C'est vrai qu'il y a moyen de le faire tout seul, nous on a signé récemment chez Naïve en France parce que quand tu commences à tourner sur beaucoup de territoires, il devient compliqué de distribuer ton disque. On signe en licence chez eux, donc ça veut dire qu'on est producteur du disque et qu'eux s'occupent de la distribution. C'est surtout au niveau de la distribution que c'est compliqué parce que ta popote, tu peux la faire dans ton coin. Je crois que maintenant, il y a quasi moyen de faire tout tout seul, c'est super. Nous avons réussi à faire des festivals comme le Rock En Seine sans disque sorti dans le territoire, c'est quelque chose d'assez improbable et fou ! C'est vraiment du bouche-à-oreille. Certains groupes, comme par exemple Fauve, bossent dans des labels, ils connaissent très bien la chose et les structures et ensuite, ils créent eux-mêmes leur propre label. Nous, c'est ce qu'on tend à faire dans l'absolu, mais on n'a pas bénéficié d'un budget aussi impressionnant que Fauve, qui en plus peut vendre des disques comme des petits pains. Un label, ce n'est pas forcément quelque chose de mal, on ne voit pas ça comme quelque chose de négatif. Quand on a signé, on ne s'est pas dit qu'il le fallait, que c'était obligatoire. C'est juste qu'au lieu d'être tout le temps en train de te poser des questions, tu te décharges d'une partie des responsabilités et tu peux te concentrer sur des aspects plus artistiques, et non plus des trucs de promo ou des trucs chiants. C'est super, au début, de vivre l'aventure à fond et de justement pouvoir toi-même le faire, et c'est vraiment faisable. Nous, on l'a fait jusqu'en avril, donc deux ans et demi en solo complet. Après, c'est clair que le démantèlement des labels est visible à l'œil nu, les gens se font virer de partout, on ne sait pas combien de temps ça durera.

De plus en plus de labels indépendants se créent aussi …

A : Voilà, c'est beaucoup plus indépendant, les gens font leurs trucs dans leur coin, à côté de leur boulot. Ce qui est important aussi, c'est d'avoir un label qui a une crédibilité, ou bien signer dans une petite structure qui a de gros retentissements, internationalement parlant. Par exemple, on connait « Crammed Discs », qui est à Bruxelles. C'est un label énorme, il signe des groupes énormes à l'étranger, alors que ce n'est qu'un mec à Bruxelles. Ça dépend de ce que tu veux faire. Nous, à priori on est chez Naïve, on va y sortir un disque mais on ne sait où ils en seront dans deux, trois ou cinq ans. Mais c'est assez gai de travailler avec des gens et de se décharger de certaines choses.

Vous avez dit une fois dans une interview que vous « teniez à rester éloignés du pop rock wallon qui tourne en rond ». Pouvez-vous nous expliquer ?

A : Je pense que ça vient de la première interview qu'on avait faite pour Focus Vif, et que le journaliste avait tourné nos paroles comme ça. Je trouve qu'il y a vraiment un renouveau dans la pop en Belgique avec pas mal de groupes, que ce soit à Bruxelles ou en Wallonie. Mais pendant tout un temps, ça tournait un peu en rond. Certains groupes étaient empathiques, mais n'étaient pas mémorables, incroyables. Il y a eu des gros groupes, comme les Girls In Hawaii, Ghinzu, Hollywood Porn Stars, qui ont été très marquants. Ils ont fait plein de plus petits groupes, comme My Little Cheap Dictaphone pour Hollywood Porn Stars. Et pour Ghinzu, en dessous tu as Montevideo, puis les Vismets... ça forme des grandes familles, et à chaque fois tu as l'impression que ça devient un peu moins bon. Nous n'avons jamais voulu appartenir à ce truc-là, parce qu'on ne connait personne là-dedans et qu'on n'a jamais vraiment écouté ces groupes, à part Girls In Hawaii à l'époque et un peu Ghinzu au tout début. On ne se sentait pas dans cet esprit-là, parce qu'on est un peu des ploucs dans un local et qu'on fait nos petits trucs. On n'avait pas l'attitude des grands rockers, à mettre des grands perfectos ou des lunettes de soleil tout le temps.

T : ça, c'est ce qu'on appelle les rockers méchants !

A : Les rockers méchants c'est un peu tout ça. C'est lié à ce pop rock wallon qui tourne en rond.

Comment décririez-vous votre musique, dans ce cas ?

T : Je pense qu'on fait clairement de la pop, c'est un peu notre bagage à tous. On a un peu compliqué ça avec d'autres styles qu'on a découvert et qui ont enrichit le notre. Je ne crois pas qu'on fasse de la pop expérimentale, même si au début c'était un peu plus notre façon de travailler, on expérimentait les choses. On fait de la pop indé, dans le sens où on a vraiment une manière très indépendante de gérer le groupe, de gérer la musique et de la sortir, de la distribuer. On garde tout en main.

A : C'est de la pop aventureuse, parce qu'on ne reste pas cloîtrés dans un carcan super lisse. On écoute beaucoup de choses et on aime bien que ça transparaisse dans ce qu'on fait, nous n'avons pas envie de quelque chose de linéaire. Ce qu'on cherche, c'est des cassures, des trucs accidentés. Les chansons sont comme en dents de scie, c'est un peu le concept.

Et au niveau de vos influences ? Certains trouvent que votre chanson « Our Lights » pourrait faire partie d'un album d'Alt-J, par exemple.

A : Ce n'est pas une influence parce que c'est un groupe qu'on a découvert après, mais c'est un très bon groupe.

T : En fait, il y a pas mal de groupes de pop justement « indépendants » qui ont été influencés par des énormes groupes, comme les Animal Collective, qui étaient un peu les pionniers de la pop expérimentale. Après, il y a pas mal d'autres groupes.

A : ça remonte même plus loin, il y a par exemple les Flaming Lips, Sufjan Stevens ou Grandaddy, ce sont des choses qu'on a beaucoup écoutées. Même Radiohead, c'est con mais évident. 

Vous avez chacun vos influences, ce forme un tout, ou avez vous plutôt des goûts assez similaires ? 

T : Non, on écoute plutôt les mêmes trucs. En fait, aujourd'hui on se partage énormément de choses.

A : Ce n'est pas un cocktail d'influences, parce qu'on a quand même des goûts qui sont proches. C'est pour cela qu'on arrive à créer cette musique-là ensemble, on a une esthétique qui est, dans nos têtes, similaire. Ça arrive rarement qu'il y en ait un qui écoute un truc et que les autres lui disent que c'est naze. Il n'y en a pas un qui écoute du funk, un autre qui écoute du métal ou quoi. On a plus ou moins les mêmes goûts. Après, le but n'est pas de balancer toutes ses influences sur la table, c'est juste qu'on a une vision de la pop qui est un peu pareille et qu'on a envie d'aller en avant. On est ok pour aller dans une certaine direction, et on essaie de garder le cap.

Vous parlez souvent de vie après la mort, ainsi que de choses spirituelles, y a-t-il un message à travers vos chansons ?

T : Il n'y a pas de message. Les paroles c'est toujours la dernière étape de la composition. Par contre, il y a quelque chose qui est sorti assez naturellement, quelque chose d'assez sombre, peut-être un peu surnaturel, un peu lugubre. Mais il y a aussi plein de chansons qui ne sont pas du tout surnaturelles, qui parlent juste de gens qui se détestent et qui se disent des choses dégueulasses. Mais donc il n'y a pas du tout de message, on ne prétend pas de faire de la grande poésie ou quoi que ce soit. On reste, je pense, dans une tradition de pop anglo-saxonne, dans le sens où on pourrait dire plus ou moins n'importe quoi si ça sonne bien musicalement : c'est le plus important. On envisage vraiment les voix comme un instrument supplémentaire. Quand on compose, on ne fait que du baragouinage, et ensuite on essaie de trouver les mots qui se rapprochent le plus de ce baragouinage. Et autour de ça, il va y avoir un thème assez récurrent comme la mort ou ce genre de chose. C'est vrai, mais ce n'est pas spécialement torturé.

Comme vous chantez en chœurs, qui compose les chansons ?

T : Les textes, on les fait plus ou moins à deux. Je balance le principal, puis je retravaille ça avec Diégo qui est traducteur et qui s'en sort vachement mieux.

Lors de l'écoute de vos chansons, on ressent l'impression de voyager dans un monde parallèle. Qu'est-ce qui vous importe le plus quand vous enregistrez, l'émotion ou la technique ?

T : Ce n'est surement pas la technique ! On cherche d'abord à nous transporter, nous. Parfois on s'enregistre en jouant des trucs en live et on se dit « Wow, là on a eu des émotions ». Souvent ça se termine en faux pleurs, ça passe bien. Ce n'est certainement pas la technique. BRNS, c'est beaucoup d'idées très simples, qu'on superpose. C'est surtout au niveau de la structure et des contrastes qu'on va retravailler par après. On est loin d'être des virtuoses.

Quel est le sens caché derrière BRNS ?

T : Ce n'est pas tellement caché, c'est complètement assumé, ça vient des films de zombie. Ça fait partie de l'imagerie qui entoure BRNS. A l'époque on regardait énormément de films d'horreur, de vieux films bien série B, et le nom est venu à ce moment-là. Après, il y a peut-être un côté un peu cinématographique dans BRNS, dans la façon de raconter des histoires.

En parlant de cinématographie, vous créez vous-mêmes le concept de vos clips, les scénarios ?

T : ça s'est passé comme ça pour le premier clip, mais ce n'était pas notre volonté. Pour tout ce qui est travaux extérieurs, par exemple l'image, on préfère vraiment travailler avec des artistes qui ont une patte très particulière. On préfère leur laisser la possibilité de faire tout ce qu'ils veulent et qu'ils puissent vraiment exploiter un univers qui leur est propre et qui soit complètement original. On ne veut pas commencer à leur mettre des barrières. Le premier clip ne s'est pas vraiment passé comme ça. Du coup ça a plutôt été une collaboration, nous avons écrit le scénario ensemble.

Quelle est l'histoire derrière le clip de « Mexico » ?

T : C'est un peu une métaphore de ce qui avait été improvisé dans les paroles. La chanson parle d'un mec qui est complètement perdu dans un bus et qui recherche son chemin vers la lumière, symbolisée par Mexico. Dans le clip, on a abandonné l'idée du Mexique mais c'est plus ou moins le même principe. C'est un gars qui se réveille dans un univers très froid, et qui recherche la lumière.

Un conseil pour des groupes débutants qui souhaitent avoir un parcours similaire au votre ?

T : Il y a plusieurs choses. Ça dépend du but. Il y a des groupes qui veulent faire de la musique pour réussir et gagner plein de pognon. Quand tu es dans cet état d'esprit, ce n'est pas évident parce que tu te mets beaucoup de pression. C'est un peu cliché, mais le but premier pour les groupes qui veulent vraiment faire ce qui leur plait, c'est d'aller au fond de leurs idées.

A : Je crois que ce qui est super important, et c'est ce qui nous a permis d'en arriver là, c'est d'écouter plein de choses. Nous, on était dans des groupes de « merde » quand on écoutait de la musique de « merde ». Il y a un moment où quand tu écoutes des trucs balèzes, tu te rends compte que le champ des possibles est infini. Que dans la musique, tu peux aller beaucoup plus loin, que tu ne dois pas faire des reprises d'AC/DC tout le temps dans ton petit local. Lorsqu'on a vraiment commencé à écouter des trucs plus pointus, on s'est demandé ce qu'on avait foutu ! Pas qu'on ait perdu notre temps, mais on faisait un peu du caca parce qu'on ne se rendait même pas compte de ce qu'il y avait à écouter dans le monde. On s'est dit qu'on pouvait aller beaucoup plus loin. Qu'on devait faire un truc qui ne marcherait peut-être jamais et sûrement pas en Belgique - car au début c'était vraiment notre état d'esprit, on pensait faire quelque chose d'atypique pour ici – mais que tant qu'on en serait content, ce serait bien. Et c'est ça qui a plu, c'est le fait qu'on n'ait pas du tout cherché le consensus ou essayé de ressembler à tel autre groupe. Si j'ai bien un conseil à donner aux gens, c'est de s'ouvrir un peu musicalement. Je crois qu'en Belgique il y a vraiment un gros problème d'accès aux musiques un peu alternatives, que ce soit dans les festivals, ou même à la radio - surtout à la radio. Si les gens allaient un peu plus loin, ça deviendrait vraiment super excitant. Il y a moyen de faire facilement quelque chose d'original et qui peut marcher.

Un endroit insolite où vous aimeriez jouer ?

A : Sur la Tour Eiffel !

Site officiel de BRNS

Interview et photo par Alizée Villance.

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Post? par Alizee Villance

FOCUS:

BRNS est un des groupes belges les plus excitants du moment. Voguant légèrement en marge du music business rock francophone, leur identité et leur musique se confondent comme par miracle (…)

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